La Protection de la Nature ou le retour aux sources
Par Dominique JULIEN-LABRUYÈRE - Vice-Président de France Ecologie.
Ancien Conseiller Régional d'Ile de France (1992-1998)
Rapporteur en 2010 sur la gouvernance locale des Aires protégées
Co-fondateur du PNR de Chevreuse
Conseiller Municipal de Cernay-la-Ville (2014-2020)
La Convention Citoyenne pour le Climat a finalisé, après neuf mois de travail, son étude sur le réchauffement climatique.
L'objectif, clairement défini par le président, réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, pourrait être considéré comme atteint. Le résultat des travaux montre le sérieux et l'application des participants, qui ont donné leurs réponses en 149 propositions.
Cinq thématiques développées, dans ce rapport, formulent les options étudiées :
Consommer, cela concerne l'affichage, la publicité, la surconsommation, le suremballage et l'éducation ce sont des critères essentiellement financiers. Par contre, assurer une meilleure application des politiques publiques environnementales et les évaluer pour les rendre plus efficaces permettrait d'orienter les bases politiques du futur.
Produire/travailler, c'est-à-dire, transformer l'outil de production et l'emploi, en renforçant les exigences environnementales avec la création d'un bilan carbone dans les comptes des entreprises, protéger les écosystèmes et la biodiversité, encourager la sobriété énergétique, sont de vrais enjeux pour notre société industrielle.
Se déplacer, modifier l'utilisation de la voiture individuelle, avec un retour fort de l'usage du train, permettre un transfert modal ferroviaire ou fluvial, des véhicules plus propres, limiter le transport aérien, ces projets seront difficiles d'accès.
Se loger, la rénovation des bâtiments, la régulation de la consommation d'énergie et l'artificialisation des sols, représentent autant de progrès intéressants.
Se nourrir, une alimentation saine durable et moins animale, peu émettrice de gaz à effet de serre, en développant les circuits courts et en réduisant le gaspillage alimentaire. Développer l'agroécologie, en utilisant les aides de la PAC, inciter une pêche à faible émission de gaz à effet de serre, créer une politique commerciale pour une alimentation saine, mieux informer les consommateurs et réformer les labels, réglementer l'usage des additifs alimentaires et légiférer sur le crime d'écocide donneraient un coup de pouce à la sauvegarde des écosystèmes.
La traduction de ces propositions en termes législatifs, ainsi que les orientations de financement sont très documentées, en espérant que le nouveau gouvernement veuille bien se les approprier, déjà le Président a prévenu qu'il ne retiendrait pas tout !
Cependant cette lutte contre le réchauffement climatique semble fictive, car on ne sait pas quels moyens mettre en œuvre pour lui donner une réponse immédiate !
L'augmentation des températures moyennes de l'air et des océans, du fait des émissions de gaz à effet de serre, n'est plus contestable.
Les gaz à effet de serre d'origine industrielle ont un impact certain sur ce réchauffement climatique, mais on ne connaît pas leur pourcentage par rapport aux autres facteurs, tels que le volcanisme ou simplement le soleil !
Les engagements des États, surtout en Europe, sont basés sur les marchés de quotas (tonnes) de carbones, qui sont des échanges de devises incitatives mais ne répondent pas aux réalités physiques d'épuration de l'atmosphère.
Ces actions ne sont donc pas en mesure d'engendrer une pause de ce réchauffement, du fait de la durée de vie du dioxyde de carbone et des autres gaz à effet de serre.
Ce qui ne présage rien de bon par rapport aux demandes des jeunes du monde entier, qui attendent des réponses immédiates !
Mais surtout, cet enjeu majeur, du réchauffement climatique, ne doit pas faire oublier la notion de protection de la nature, base essentielle de l'écologie.
Notre planète même polluée, irrespirable, ayant perdu sa faune pourrait tourner encore longtemps autour du soleil, sans nous ! Le slogan « sauvons la planète » est inadapté, ce n'est pas la planète qui est en jeu mais cette infime partie de la croûte terrestre où s'est développée la vie !
L'espèce humaine a construit ses mégalopoles, choisit ses modes de déplacements, colonisé tout l'espace et détruit les animaux et végétaux qu'elle considérait comme nuisibles pour en finir avec cette nature hostile, qu'elle a dominé.
La nature est sauvage et asociale, l'homme ne déroge pas à cette règle, mais lorsqu'il en fait une industrie, en traitant les animaux comme des objets, il ne respecte plus le pacte originel.
Il faudra du temps pour recréer une harmonie réciproque, entre les animaux sauvages et nous, c'est pourtant l'objectif à atteindre pour un retour aux sources de la vie.
Si l'homme a détruit la nature sauvage, c'est qu'il en a peur ! Une peur profonde et inconsciente qui provient des premières lueurs de l'humanité.
Les phobies à l'origine de cette peur conditionnent ses comportements, la protection de la nature est donc conçue comme un nettoyage de l'espace, pour le rendre conforme à l'image que l'on désire, ce qui le rend artificiel.
Alors que toutes les terres devraient avoir le même degré de protection et non pas les seuls parcs et réserves qui laissent le reste des sols vulnérables à toutes les convoitises.
L'entière dépendance de l'humanité aux espèces végétales et animales qui l'entourent est trop souvent oubliée, la photosynthèse pour l'air que nous respirons, les bactéries qui épurent l'eau que nous buvons, les animaux et végétaux que nous mangeons quotidiennement.
La nature a des capacités de se réactiver colossales. Ce qui signifie que les actions menées en faveur de sa renaissance peuvent donner des résultats visibles sur des périodes relativement courtes, contrairement aux actions pour le climat.
Protéger la biodiversité et lutter contre la pollution de l'air sont des actions nécessaires, mais nous les réalisons un peu comme si nous travaillions pour d'autres que nous, alors que nous sommes la biodiversité et que nous vivons grâce à l'oxygène que nous respirons.
Nous devons reconsidérer notre vision de la nature, cette approche est la seule capable de donner une réponse à nos problèmes et ce n'est pas la création de nouvelles taxes ou impôts qui pourront y remédier.
Remettre en cause nos modes de vie et de déplacements, évoluer vers une sorte d'éden terrestre, s'inspirer de la nature pour les technologies du futur, stopper l'artificialisation des territoires, considérer la biodiversité comme notre assurance vie, voilà à quoi nous sommes confrontés...
Il s'agit d'en faire une préoccupation majeure pour la société civile toute entière.
Le besoin de participer, de décider de son propre devenir, de passer du statut de témoin à celui d'acteur, n'a jamais été aussi ressenti parmi nos concitoyens, il est peut-être temps, de leur faire confiance en leur confiant les clés de la gestion de leurs propres territoires.
Dominique JULIEN-LABRUYÈRE - Vice-Président de France Ecologie.
Le 09/07/2020